L’artillerie de la Première Guerre mondiale - Musée de la Grande Guerre
09.05.24

Si l’artillerie avait connu de grandes évolutions au cours du XIXe siècle, la Première Guerre mondiale allait entraîner une transformation rapide. L’enlisement du conflit et sa conversion en guerre de positions sur le front ouest change les besoins stratégiques. Il faut à présent pouvoir détruire des abris profondément enfouis dans le sol, les barbelés qui bloquent la progression des assauts, mais aussi les canons adverses. De 1914 à 1918, l’artillerie occupera un rôle central, alors que les effectifs et les modèles se multiplieront.

À quoi ressemblait l’artillerie de la Première Guerre mondiale ?

Chaque pays engagé dans le conflit était équipé différemment au début du conflit. Par exemple, si la France disposait de canons de 75, un modèle de canon de campagne novateur, notamment par son frein de recul qui faisait qu’il n’était pas nécessaire de repositionner l’arme entre chaque tir, elle disposait de peu d’artillerie lourde, dont le besoin allait pourtant rapidement se faire sentir. Quant aux Américains, à leur entrée en guerre en 1917, ils sont sous-équipés en canons par rapport à l’ampleur du conflit (moins de 600) et doivent donc s’équiper en artillerie de fabrication française et britannique en attendant que leur production domestique s’adapte. Voici les modèles les plus utilisés pour certains des principaux belligérants.

L’artillerie française

L’artillerie française a connu une évolution rapide. Si le canon de 75 mm était le principal modèle disponible, la France a dû rapidement s’adapter, comme les autres nations, aux réalités de la guerre de positions et a développé des modèles d’artillerie lourde, avec par exemple le développement de l’artillerie sur voie ferrée.

En savoir plus : l’artillerie française de la Première Guerre mondiale.

Au cours de la guerre, la France aura notamment fait appel aux pièces d’artillerie suivantes :

  • le canon de 75 ;
  • le canon de 105L modèle 1913 Schneider ;
  • l’obusier 155L modèle 1917 ;
  • le canon de 155 mm GPF ;
  • le mortier Schneider de 220 TR ;
  • l’artillerie lourde sur voie ferrée (ALVF), qui transporte des pièces lourdes comme le canon de 340 mm modèle 1912, capable de tirer à 33 km des obus de 465 kg.

L’artillerie allemande

Au début de la guerre, l’Allemagne dispose d’une artillerie de campagne nombreuse et d’une artillerie lourde puissante, le tout mobilisant 280 000 hommes. Cependant, elle constate rapidement les limites des canons de campagne et ses besoins en artillerie lourde. Elle adaptera ses stratégies et son matériel et unifiera son artillerie en 1917.

Parmi les pièces d’artillerie les plus représentatives, on retrouve :

  • le canon de campagne de calibre 77 mm ;
  • l’obusier de calibre 105 mm ;
  • le mortier de calibre 21 cm Moerser ;
  • l’obusier lourd de calibre 15 cm ;
  • 4 super mortiers de calibre 420 mm, connus surnommé la « Grosse Bertha » par les Allemands, à ne pas confondre avec le canon qui a été utilisé pour le bombardement de Paris en 1918 ;
  • celui-ci a été surnommé ainsi par les Français uniquement, mais il s’agissait d’un modèle très différent, de 240 mm, que les Allemands appelaient de différentes manières : Pariser Kanonen, Die Pariserin, Wilhlemsrohr, Langer Max…

L’artillerie britannique

Après la seconde guerre des Boers de (1899-1902), les Britanniques prennent conscience de la supériorité de l’artillerie de campagne des autres puissances européennes et décident d’améliorer la leur. En 1902, plusieurs industriels anglais proposèrent des prototypes en fonction d’un cahier des charges exigeant, bien qu’aucun ne fut retenu. Ce n’est qu’un 1904 qu’un modèle reprenant certaines caractéristiques des prototypes proposés est homologué. On retrouvera alors deux modèles :

  • le canon de 13-Pounder (calibre 76,8 mm), qui sera rapidement jugé peu efficace, mais sera employé pour appuyer les troupes en Mésopotamie et en Palestine et sera modifié pour participer à la défense anti-aérienne ;
  • le canon de 18-Pounder (calibre 83,8 mm), qui deviendra la principale pièce d’artillerie de campagne des armées britanniques et du Commonwealth.

L’artillerie américaine

Comme indiqué précédemment, en 1917, l’artillerie américaine n’était pas prête pour un conflit d’une telle ampleur. La nécessité de mettre en place une grande armée opérationnelle rapidement conduira les Américains à passer des accords avec le gouvernement français. Les calibres 75 et 155 mm deviennent alors les standards de l’US Army. Si leur objectif était de produire leur propre artillerie, dans les faits, la guerre se terminera avant qu’ils puissent mobiliser leurs propres canons en masse en Europe. Grâce à la france, les États-Unis disposeront cependant :

  • de canons de 75 mm modèle 1897 ;
  • d’obusiers de 155 mm C modèle 1917 ;
  • de canons de 155 mm GPF modèle 1917 ;
  • de mortiers de 240 mm Schneider.

L’artillerie italienne

L’Italie entre en guerre le 24 mai 1915. Si son artillerie avait été modernisée, elle reposait essentiellement sur des petits calibres censés soutenir l’assaut de l’infanterie. Comme pour la France, l’artillerie lourde avait été négligée. Les Alliés lui fournirent des moyens et gros calibres et la production italienne se développa, avec 16 000 canons et 70 millions d’obus, ce qui lui permettait de disposer au printemps 1917 de 4000 pièces légères, 3000 pièces moyennes et 157 pièces lords ainsi que de mortiers de tranchée appelés “bombardes”. Si la débâcle de Caporetto (24 octobre – 9 novembre 1917) verra la quasi-totalité de l’artillerie italienne détruite, la production parvient à suivre la cadence (540 canons sortaient des usines chaque mois). Ainsi, le généralissime Armando Diaz disposera de 5650 pièces et 1570 mortiers, de tranchées, soit plus que l’armée austro-hongroise, lors de la victoire finale de Vittorio Veneto, le 3 novembre 1918.

Parmi les pièces d’artillerie utilisées par l’Italie, on retrouve :

  • le canon de 75 mm, modèle français Deport, artillerie légère de campagne ;
  • l’artillerie de montagne de 65 mm, adaptée au combat en montagne ;
  • des canons moyens et lourds de 149 mm et des obusiers de 210 mm.

L’artillerie russe

En 1914, les Russes pouvaient profiter de l’expérience accumulée dans l’artillerie au cours de la guerre Russo-Japonaise (1904-1905). Elle était dirigée par le grand-duc Serge, son inspecteur. Cependant, elle s’avèrera trop peu nombreuse par rapport à celle des adversaires allemands et austro-hongrois. Qui plus est, la production d’obus ne suit pas la consommation, notamment de la fin 1914 à l’hiver 1915. Par la suite, l’augmentation de la production et les livraisons alliées régleront cette question.

Elle était notamment composée :

  • de canons Poutilov, de 76,2 mm modèle 1902, principale pièce d’artillerie ;
  • d’obusiers de divers calibres, notamment de 122 mm et de 152 mm pour l’artillerie lourde.

L’artillerie de tranchée

Les artilleurs de tous les camps ont été confrontés aux mêmes difficultés imposées par les tranchées. Pour atteindre une tranchée depuis une autre tranchée, il faut pouvoir réaliser un tir en cloche. Hors, les canons traditionnels comme le 75 mm français n’ont pas été conçus pour cela.

Les Allemands, eux, disposaient déjà de pièces d’artillerie à tir courbe adaptées au combat de tranchées : les Minenwerfer (lance-mines), développées au départ pour attaquer des fortifications ou camps retranchés depuis des tranchées d’approche. L’artillerie de tranchées française se met en place avec tout d’abord l’emploi de mortiers de circonstances comme le Cellerier. Ces pièces sont appelées « crapouillots » en raison de leur forme.

C’est à partir de janvier 1915 que l’infanterie française peut commencer à être appuyée par une artillerie de tranchée puissante et mobile. C’est en effet à ce moment que sont introduits les mortiers de 58 mm T n°1, n°2, puis n°1 bis, qui projettent des bombes à ailettes avec un rapport masse totale/masse explosive très avantageux. Les artilleurs sont formés à leur utilisation par le Centre d’Instruction de l’Artillerie de Tranchée (CIAT), créé en 1915 à Bourges.

L’armée française continuera de développer des modèles spécialisés (mortier de 240 mm court de tranchée de 1915, mortier de 340 mm T, etc.). Au premier juillet 1916, ce sont près de 2800 pièces d’artillerie de tranchées qui seront en action sur le front, sans compter les armes de fortune développées par les soldats. Ce développement favorable sera l’un des facteurs qui décideront les états-majors alliés à lancer la bataille de la Somme.

Mortier Cellerier
Mortier Cellerier

En savoir plus sur l’artillerie de la Première Guerre mondiale

Vous voulez en savoir plus sur l’artillerie de la Première Guerre mondiale ? Le Musée de la Grande Guerre de Meaux vous propose d’en découvrir plus sur l’impact de ces armes nouvelles sur le conflit et les hommes qui l’ont vécu.