Qu’est-ce qu’une guerre de tranchées ?
Musée ouvert aujourd’hui de 09h30 à 18h00
En 1914, le monde était encore caractérisé par le colonialisme. Les puissances européennes s’étendaient sur plusieurs continents, notamment en Asie et en Afrique. De grandes rivalités existaient entre ces grandes puissances et l’éclatement de la Grande Guerre allait entraîner ces terres lointaines dans le conflit. Enjeux territoriaux en outre-mer, troupes recrutées sur place et envoyées combattre en Europe… voici le rôle qu’ont pu jouer les colonies au cours de la Première Guerre mondiale.
Le Royaume-Uni était à l’époque le plus grand empire colonial, avec des possessions du nord au sud de l’Afrique, mais elle avait également l’intégralité du sous-continent indien ainsi que les actuelles Birmanie et Malaisie et plusieurs îles dans le Pacifique et dans les Caraïbes. L’Australie, le Canada, Terre-Neuve, la Nouvelle-Zélande et l’Afrique du sud étaient des dominions, ce qui voulait dire qu’ils étaient en grande partie autonomes, mais dépendaient encore de Londres pour leur politique étrangère.
La France était le deuxième plus grand empire colonial, avec une grande partie du nord-est de l’Afrique, ainsi que Madagascar et l’Indochine comme principales colonies.
En 1914, l’Allemagne avait également un empire colonial : elle possédait plusieurs possessions sur la côte ouest (correspondant aux actuels Togo, Cameroun et Namibie) ainsi que sur la côte orientale (correspondant aux actuels Rwanda, Burundi et Tanzanie). Elle a également étendu son influence sur le Pacifique en colonisant une partie de la Nouvelle-Guinée et plusieurs îles et archipels comme les Samoa ou Nauru. Enfin, l’Allemagne possédait une concession en Chine : Qingdao, ce qui la faisait entrer en concurrence avec les ambitions japonaises dans la région et explique l’entrée en guerre du Japon aux côtés des alliés.
D’autres belligérants avaient leurs propres colonies, mais de moindre envergure : la Belgique possédait le Congo belge, le Portugal les actuels Angola et Mozambique et l’Italie possédait la Libye, l’Érythrée et une grande partie de la côte des Somalis.
Les colonies sont notamment connues pour les troupes qu’elles ont fournies. En France, on connaît notamment les tirailleurs sénégalais (terme qui regroupe en réalité tous les soldats mobilisés en Afrique subsaharienne), mais des troupes venues du Maghreb, de Madagascar ou encore d’Indochine, d’Océanie (bataillon mixte du Pacifique (BMP)) et de la côte des Somalis (1er bataillon de tirailleurs somalis) sont également venues renforcer les rangs français. Sur les 8 500 000 soldats mobilisés, environ 600 000 venaient des colonies. Il est à noter que les troupes venues des Antilles, de Guyane et de La Réunion ont été intégrées aux troupes métropolitaines.
Ces troupes ont été mobilisées sur de nombreux fronts et ont participé à des batailles telles que :
Le Royaume-Uni a également mobilisé ses troupes coloniales, notamment en Inde, où plusieurs centaines de milliers d’hommes ont été mobilisés et ont combattu sur de nombreux fronts, notamment en Europe, en Afrique de l’est contre l’Allemagne et contre l’Empire Ottoman (Mésopotamie, Dardanelles, Sinaï, Palestine, etc.).
Les colonies africaines ont également été mises à contribution au sein de différentes unités, notamment les King’s African Rifles, qui ont combattu lors de la Campagne d’Afrique de l’Est.
Enfin, les Britanniques ont également mobilisé leurs troupes dans les Caraïbes (Jamaïque, La Barbade, Trinité-et-Tobago, etc.) au sein de plusieurs régiments (West India Regiments). Ceux-ci ont servi à la fois en Afrique de l’est et en Palestine.
Au sein de leurs colonies africaines, les Allemands avaient formé des troupes de défense locales nommées Schutztruppen (troupes de protection). Elles dépendaient directement de la colonie et ne faisaient pas officiellement partie de l’armée impériale. On retrouvait des combattants blancs, mais aussi des hommes recrutés sur place, que l’on nomme souvent askaris (appellation qui finira par s’étendre aux troupes de toutes les puissances coloniales). Ces soldats n’ont pas été combattre en Europe et ont été mobilisés pour défendre les possessions allemandes en Afrique contre les puissances rivales voisines jusqu’à la fin de la guerre. Elles ont connu de nombreux combats, comme :
Alors que la Belgique était presque entièrement occupée par l’Allemagne, le Congo belge se mobilisa aussi pour combattre sur le front de l’est de l’Afrique. Avant la guerre, les Belges avaient formé la Force publique, qui avait avant tout un rôle de police au sein de la colonie. C’est cette force qui a été mobilisée pendant la guerre.
Les colonies n’ont pas fourni que des combattants. En effet, alors que les hommes étaient partis au front, le manque de main d’œuvre se faisait sentir. La France a notamment recruté plus de 200 000 travailleurs venus notamment d’Algérie, du Maroc, de Tunisie et d’Indochine et d’autres colonies. De nombreux travailleurs mobilisés étaient également chinois (37 000). Ils ont notamment travaillé dans les usines de matériel et de munition, à l’intendance, dans les mines, les transports ou encore les travaux de terrassement à l’arrière et sur le front.
Les colonies allemandes en Afrique, encerclées d’ennemis français, britanniques et belges (puis portugais à partir de 1916) doivent se défendre et connaissent des sorts divers. Le Togo tombe dès août 1914 et le Cameroun en 1916. Au sud-ouest, les Allemands trouvent des alliés chez les Boers d’Afrique du sud, encore marqués par la guerre qu’ils ont subie contre les Britanniques quelques années plus tôt. Dès septembre 1914, ils prennent les armes et s’allient aux Allemands, c’est la Rébellion Maritz, qui ne sera vaincue qu’en février 1915. Les Britanniques traversent ensuite le désert du Namib et prennent Windhoek, capitale des colonies allemandes du sud-ouest de l’Afrique en juillet 1915.
En revanche, la colonie allemande d’Afrique de l’est résiste pendant les 4 années de la guerre contre les troupes du Royaume-Uni, de la Belgique et du Portugal. Les troupes coloniales allemandes, menées par Paul von Lettow-Vorbeck parviennent à mettre en échec les alliés notamment en battant les Britanniques et leurs troupes d’Inde à la bataille de Tanga en novembre 1914, durant laquelle ils récupèrent des armes et munitions abandonnées par l’armée ennemie en déroute. Par la suite, ils résisteront en utilisant des tactiques de guérilla pendant 4 ans.
Le nord de l’Afrique a également vu des affrontements dans le cadre du front du Moyen-Orient. La Tripolitaine et la Libye, colonies italiennes, ont vu des combats entre d’une part, le Royaume-Uni, la France et L’Italie contre des tribus berbères et les milices Senoussi, soutenues par les Ottomans pour éloigner les troupes alliées de la Palestine et du Sinaï. Les affrontements prennent fin à l’armistice de Moudros, signé entre les alliés et les Ottomans le 30 octobre 1918.
L’Océanie a également connu des engagements, principalement du 29 août au 9 novembre 1914. Les colonies allemandes du Pacifique, peu défendues, tombèrent rapidement aux mains des alliés proches : Français, Britanniques, Néo-zélandais, Australiens et Japonais. Par exemple, l’île de Nauru se rend sans combattre le 9 septembre 1914.
En Asie orientale, le principal enjeu colonial était la concession allemande de Qingdao (retranscrite Tsingtao, à l’époque) en Chine, sur la péninsule de Shandong. Elle fut prise par les japonais le 7 novembre 1914.
Après la défaite et la signature du traité de Versailles, l’Allemagne se voit obligée de céder ses colonies aux vainqueurs :
La Première Guerre mondiale aura cependant d’autres conséquences sur les colonies. Les peuples colonisés, voyant que leurs conditions de vie ne s’améliorent pas en dépit de leur rôle important dans la guerre, voient leurs sentiments nationalistes s’exacerber.
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