Les tirailleurs sénégalais - Musée de la Grande Guerre

Les tirailleurs sénégalais dans la Première Guerre mondiale

09.03.24

Les colonies ont participé à la Première Guerre mondiale et ont joué un rôle central. Venus d’Afrique, d’Inde, d’Indochine ou d’ailleurs, les empires coloniaux ont recruté des hommes par centaines de milliers pour combattre sur plusieurs fronts. En France, les tirailleurs sénégalais comptent parmi les plus connus du grand public. D’où venaient-ils et quels sont leurs faits d’armes ?

Qui étaient les tirailleurs sénégalais ?

Le corps des tirailleurs sénégalais existait bien avant la guerre. Il a été fondé en 1857 par un décret de Napoléon III et les premiers recrutements ont eu lieu au Sénégal, d’où leur nom. Cependant, il est important de noter que par la suite, des hommes ont été recrutés dans tous les territoires d’Afrique sub-saharienne colonisés par la France.

Avant la Grande Guerre, ils participent à de nombreuses campagnes de l’armée française, notamment en Afrique où par exemple ils ont participé à la conquête de Madagascar. Ainsi, en 1914, c’était une force en place sur laquelle la France savait qu’elle pouvait s’appuyer.

Si les effectifs de ces troupes étaient suffisants en temps de paix, face à l’ampleur de la Grande Guerre, le recrutement ne se base plus uniquement sur le volontariat. Les autorités françaises demandent alors aux chefs locaux de leur envoyer des hommes et le recrutement se fait souvent sous la contrainte. Certains tentent de contourner l’obligation en envoyant des hommes qui seront forcément réformés. Certains iront jusqu’à se révolter, comme au Bani-Volta en 1915.

L’acclimatation est difficile : une grande partie d’entre eux sont de nouvelles recrues inexpérimentées, beaucoup ne parlent pas français et ne comprennent pas les ordres qu’on leur donne et même entre eux, les soldats ne se comprennent pas forcément, car dans leurs rangs sont parlées des langues différentes telles que le bambara ou le peul. Ils doivent aussi faire face à un climat froid auquel ils ne sont pas habitués, notamment au nord. Face à la surmortalité induite par ces conditions, un système d’hivernage est mis en place à partir de 1915 et est généralisé en 1916. De septembre à avril, les soldats sont envoyés dans le sud de la France. C’est également l’occasion de les entraîner davantage. Au total, ce sont environ 200 000 tirailleurs qui ont servi de 1914 à 1918. 30 000 d’entre eux sont tombés au combat.

Un Sénégalais Joseph Léon Schultz France ©Musée de la Grande Guerre, Meaux

L’uniforme des tirailleurs sénégalais

Au cours de la Première Guerre mondiale, les tirailleurs sénégalais ont porté différents uniformes.

Au début du conflit, ils portent une tenue bleu foncé avec des broderies couleur jonquille et la chéchia comme coiffe caractéristique. Ils changent une première fois à partir du 9 décembre 1914, où ils reçoivent la même tenue bleu clair que leurs camarades français.

C’est à partir d’août 1915 qu’un uniforme kaki commence à être distribué en priorité aux tirailleurs sénégalais qui se trouvaient en première ligne.

Tirailleur sénégalais en tenue bleu horizon France ©David Raze

Où ont-ils combattu ?

La France a mobilisé les tirailleurs sénégalais en métropole dès 1914 : ils arrivent en août, puis sont envoyés sur le front en septembre. Ils participent à certaines des batailles les plus décisives du conflit, avec notamment :

Ils ont également été mobilisés sur d’autres fronts, notamment lors de la prise des colonies allemandes du Cameroun et du Togo ou encore à la bataille des Dardanelles (aussi connue sous le nom de bataille de Gallipoli).

La contribution des tirailleurs sénégalais à l’effort de guerre a été décisive. Cependant, la reconnaissance dont ils ont bénéficié a été source de controverse.

La reconnaissance des tirailleurs sénégalais

En effet, s’ils ont participé aux cérémonies de victoire après la guerre, la reconnaissance n’a probablement pas été à la hauteur de leurs attentes. Notamment, ils ne se sont pas vu accorder la nationalité française en contrepartie de leur engagement, comme on a pu leur laisser entendre.

De plus, et même si la guerre a pu contribuer à faire évoluer le point de vue des Français sur les Noirs, la société reste profondément caractérisée par le racisme. Les clichés sur le soldat africain docile et inférieur aux Blancs restent encore prégnants. Une fois rentrés en Afrique, ils sont également parfois mal perçus pour avoir lutté pour l’oppresseur.

Les tirailleurs sénégalais, bien qu’ayant combattu dans bien d’autres guerres par la suite, notamment la Seconde Guerre mondiale, auront lutté pour leur reconnaissance de la part de la France pendant des décennies. Par exemple, suite à une loi de 1981, les pensions des anciens tirailleurs sénégalais ont été cristallisées, autrement dit : elles n’étaient plus indexées sur l’inflation (contrairement à celle des anciens combattants français). Cet état de fait durera jusqu’en 2006. Un pas supplémentaire sera franchi en 2007 quand les 28 derniers tirailleurs encore en vie seront naturalisés français (mais pas leurs descendants). Cependant, pour toucher leur pension, ils ont l’obligation de résider au moins 6 mois par an en France. Il faudra attendre janvier 2023 pour que cette contrainte disparaisse.

Mais à ces dates, le dernier tirailleur vétéran de la Grande Guerre, Abdoulaye Ndiaye était déjà décédé, le 10 novembre 1998, à 104 ans, la veille du jour où il devait recevoir la légion d’honneur.

Visitez le Musée de la Grande Guerre pour en savoir plus

Le Musée de la Grande Guerre, à Meaux, vous propose d’explorer la Première Guerre mondiale sous tous ses aspects. Nos collections comportent des pièces rares liées aux soldats de tous les camps et de toutes les origines.

Du 6 avril au 30 décembre 2024, nous vous proposons également une exposition temporaire dédiée au rôle de l’empire colonial français pendant la guerre, pour approfondir le sujet !